Pour sa centième édition, en 2013, la prestigieuse "Grande
Boucle" passera par la Corse. La nouvelle, officialisée, depuis déjà
quelques temps, suscité déjà, dans l’île, un engouement important. Une
effervescence digne des plus grandes manifestations sportives. Mardi dernier,
dans les salons de la Région, le parcours détaillé a été présenté par Christian
Prudhomme, Directeur du Tourde France et Paul Giacobbi,
président du Conseil Exécutif de Corse deux des responsables de ce projet. Le
troisième -et le plus important puisqu’il en est l’initiateur- Pierre Cangioni,
refuse d’être sous les feux de la rampe. Humble, il évoque simplement et se contente
d’évoquer "une compensation due à l’insularité" pour les deux seuls
départements à n’avoir jamais abrité la moindre étape du Tour. L’ancien
journaliste exprime son sentiment sur cet événement unique.
Vous êtes à l’origine de la venue du Tour de France, en
2013, en Corse. Comment cette idée, est-elle née ?
Je souligne, tout d’abord, que je ne suis pas le seul à avoir eu cette
idée ! Qui n’a pas rêvé de voir le Tour passer en Corse ?
Les premières discussions ont eu lieu en 2004 avec Jean-Marie Leblanc, ancien
directeur du Tour de France. Pour diverses raisons, notamment la
sécurité ou plus généralement l’insularité avec toute la problématique qu’elle
pouvait occasionner pour ce type de manifestation, il n’a pas souhaité prendre
ce risque. Cela s’est avéré plus facile avec son successeur Christian Prudhomme
que je connais très bien pour l’avoir eu comme journaliste à la Cinq. Il est
venu en Corse, a découvert un décor propice au cyclisme, et décidé de le
relever ce défi. Nous avons œuvré, dans un premier temps, pour l’organisation
du critérium international. Puis, tout s’est enchaîné.
Il fallu, au préalable, convaincre les politiques.
Ils ont été favorables à ce projet. Le seul souci réside sur le fait que
nous étions avance sur le dossier mais les élections territoriales de mars 2010
ont modifié la donne. Il a fallu reprendre le dossier. À cet effet, il convient
de souligner l’efficacité de Paul Giacobbi qui a fait en sorte que nous soyons
dans les temps. Finalement, en décembre 2010, le vote à eu lieu à l’unanimité à
l’Assemblée de Corse.
Vous êtes le principal "artisan" de cette initiative. Que cela
vous inspire t-il ?
Je n’aime pas me mettre en avant, ce n’est guère dans mes habitudes. Sur le
plan personnel, je ne retire rien de cela, ce n’était pas le but de recherché.
Je dirai simplement que j’ai fait, eu quelque sorte, le "go beetween"
entre Michel Prudhomme et Paul Giacobbi. Le premier a souhaité déplacer le Tour en
Corse et le second a accepté de l’accueillir.
Le choix du centième Tour de France est-il anodin ou
réfléchi ?
C’est un choix symbolique. On est une île et ce n’est pas évident d’y faire
venir une telle compétition. C’est une compensation par rapports aux
inconvénients de l’insularité. Au moment où le Tour devient, de plus
en plus, européen -c’est sa vocation- et même peut-être, à terme, mondial,
partir de Corse pour la centième édition, c’était, je pense, quelque chose de
fort. Un beau symbole.
Que pensez-vous des retombées ?
C’est le plus grand coup de projecteur que la Corse n’aura jamais eu. On
verra des images de l’île retransmises toute la journée dans le monde entier.
C’est quelque chose d’extraordinaire que l’on ne reverra pas de sitôt. Durant
trois jours, nous aurons 200 participants, 4500 personnes, 2500 véhicules, 180
semi-remorques de matériel TV et une retransmission dans 190 pays avec 10
millions de téléspectateurs. C’est quelque chose d’unique.
Et pour le cyclisme insulaire ?
Il appartient plus à Paul Antoine Lanfranchi, président du comité ou Dumè
Bozzi, CTS d’évoquer ces retombées. J’espère, simplement, que cela boostera
l’essor de la discipline. Ce fut le cas aux Pays-Bas même s’il n’y a aucune
commune mesure puisque c’est une nation où le cyclisme est fortement implanté.
En Corse, le potentiel existe mais la situation géographique est plus propice à
l’éclosion de grimpeurs que de rouleurs.
Le choix des étapes ?
On a choisi les quatre villes portuaires les plus importantes (Ajaccio,
Bastia, Porto-Vecchio et Calvi) et un itinéraire alternant le plat et la
montagne. Les coureurs auront à franchir, dès le deuxième jour, un col de 2e
catégorie (Vizzavona, 1161 mètres), c’est l’une des premières fois dans
l’histoire du Tour. On aura donc, Porto-Vecchio-Bastia, Bastia-Ajaccio et
Ajaccio-Calvi qui ne sera également pas évident avec plusieurs cols.
On dit que le Tour de France cycliste est le troisième
événement sportif le plus important après la coupe du monde de football et les
JO. Qu’en pensez-vous ?
C’est vrai à la différence près que lors des JO et de la coupe du monde de
football, on ne voit, en dehors de quelques sujets dits d’ambiance sur le pays,
que les stades. Le tour de France cycliste est diffusé sur
les chaînes de TV durant toute la journée. France 2, par exemple,
prend l’antenne à 7h du matin et la rend à minuit. Et l’on diffuse, toute la
journée, des images et des sujets sur la région sans compter l’étape en elle-même,
qui constitue un véritable coup de projecteur. Il n’y a aucune commune mesure.
Le centre de presse sera installé sur un bateau, en mer. Pourquoi cette
idée ?
Il a fallu tenir de l’originalité de cette "formule". C’est un
cas unique puisque nous sommes une île. Nous aurons 1500 journalistes avec leur
matériel. Aucune structure, dans l’île, n’est susceptible d’accueillir un tel
nombre avec les contraintes que cela implique. Nous avons donc opté pour un
bateau qui fera escale dans les quatre ports qui abritent les trois étapes. Par
ailleurs, les coureurs et leur état major seront à terre. Quant au reste,
officiels et direction, ils seront également logés à bord. C’est une idée que
j’avais eu à l’époque où, avec mon ami le regretté Rodolfo Sabbatini (promoteur
ndlr), nous avions envisagé d’organiser, du temps de Carlos Monzon, un
championnat du monde de boxe en Corse. Il aurait drainé plus de 5000 personnes
et l’idée avait consisté à organiser ce combat sur un bateau. Malheureusement,
cela n’a pas pu se faire.
Cette venue du Tour de France en Corse constitue une
"première". Sera t-elle renouvelée ?
Je pense que, compte tenu de nombreux paramètres, ce sera très difficile
même cela ne reste pas impossible. L’évolution actuelle duTour tend, comme
je l’ai dit précédemment, vers son extension au niveau européen et mondial. Il
est déjà parti de pays frontaliers tels que la Belgique, l’Allemagne, ou les
Pays-Bas. Mais l’Irlande ou la Grande Bretagne ont été également choisies.
Aujourd’hui, des pays lointains tels que le Japon ou le Qatar ont déposé leur
candidature.
Interview réalisée par Philippe Peraut